Un petit détour. Elle en avait envie. Pourquoi ce quartier ? Il est bourré de petites racailles. Le genre qui se prend pour des gros durs. Mais qui flippent dès qu'ils se trouvent devant plus forts qu'eux. Des lopettes. À plusieurs contre une personne. Souvent plusieurs garçons contre une fille. Ça ne finit que rarement bien pour la fille. Rarement. Car si elle a de la chance, quelqu'un passe. Quelqu'un qui n'est pas trouillard. Quelqu'un qui ne prend pas sa queue entre ses jambes. Quelqu'un qui a des couilles quoi. Un peu comme Ruz Tan. Altruisme ? Oh ça non. Loin de là. Ce n'est pas par charité qu'elle aide. C'est elle-même qu'elle aide. Qu'elle divertit. C'est pour ça qu'elle a décidé d'aller dans ce quartier aujourd'hui. Pour se trouver des victimes. Pas comme ces racailles. Mais CES racailles justement. Elle aime ça. Se faire aborder par un groupe. Ou trouver un groupe. Et jouer sur eux. Se divertir sur eux. S'amuser sur eux. Et ce n'est pas la police qui va prendre leurs plaintes. Ils ont déjà mauvaise réputation. Mauvaises graines comme ils disent. Alors c'est tout bénef. Victimes parfaites.

Et il faut croire que c'est son jour de chance. Un groupe de quatre jeunes. Quatre adolescents. Ils s'en prennent à une fille isolée. Avec un bouquet de fleurs ? Dans ce quartier ? Autant mettre une pancarte 《AGRESSEZ-MOI》! Ça sera bien plus rapide. Bien plus direct. Ah bon sang. Elle s'allume sa cigarette. Elle tire une latte. Elle profite. Puis, c'est à elle de jouer. C'est son entrée en scène. La Démone s'avance. Avec un grand sourire. Avec sa cigarette entre les doigts.

Alors ? C'est quoi le menu du jour ? Petite fille rackettée ? Frappée ? Les deux ? Ou vous comptez lui faire le service complet en rajoutant le viol ? Un gangbang peut-être même ? Qui a la caméra cette fois ?
Tu veux quoi, connasse ?
Tire-toi si tu veux pas qu'on te fasse pareil !
Oooooh... J'ai peur...

Elle ricane ouvertement. Elle tire encore sur sa cigarette. Elle souffle la fumée vers eux.

Vous partagez ?
Tu te prends pour qui ?!
Pour quelqu'un qui a envie de s'amuser. Et ça tombe bien, je vous ai trouvés...

Les jeunes restent silencieux. Ils semblent perdus. Que devraient-ils faire ? La laisser se joindre à la partie ? Ou faire d'elle une autre victime ? La suivante sans doute.

Tic tac. Tic tac. Vous êtes lents, mes chéris. Je vais devoir prendre la décision à votre place si ça continue...

Elle termine sa cigarette. Tranquillement. Sans le moindre stress. Sans la moindre démonstration de nervosité. Elle joue. Le mégot tombe au sol. La Démone l'écrase sous son talon.

Le compteur est à 0.

Son regard est plus sérieux. Sa voix plus menaçante. Avec rapidité, elle empoigne la gorge de l'un des jeunes. Ruz Tan le soulève du sol. Sa poigne se serre sur sa jugulaire. Il est en train d'étouffer.

Voilà mon jeu : vous êtes MES victimes.

Sortant son arme. Sortant son pistolet 9MM. Elle tire dans leurs chevilles. Toutes leurs chevilles. Ses yeux émeraudes se posent sur la demoiselle.

Ne pense même pas à t'enfuir.

Des supplications. Ah… Quelle douce musique à ses oreilles. Quelles douces paroles. Quel plaisir. Elle adore ça. Entre celles de ces gamins. Entre celle de cette petite.

Nous tuez pas !
Pitié !
Je... Je ferais ce que vous voulez mais pitié, épargnez-nous je vous en supplie.

La Démone sourit. Sourire sadique. Sourire satisfait. Elle aime cet instant. Elle s’en lèche ses lèvres maquillées de la couleur du sang. Le sang qu’elle va faire couler. Dans peu de temps. Lentement. Avec délice. Elle en a hâte. Mais elle va prendre son temps. Mais non. Elle ne va pas tuer. Ce n’est pas son but. Ce n’est pas ce qu’elle recherche. Pas ce soir. Ils n’ont pas mérité de mourir. Ils n’ont pas de contrat sur leur tête.

Les racailles sont immobilisées. Avec ces tirs. Avec ces chevilles meurtries. Ils ne pourront pas se relever. Et s’ils tentaient… La douleur les ferait tomber. Ce serait amusant tiens. Cette pensée la fait sourire à nouveau. Mais d’abord… Elle attrape la veste de l’un des adolescents. Elle la déchire. Pourquoi ? Pour en faire une corde de fortune. Et elle attache les chevilles de la jeune femme. Et ses poignets aussi. Mais pas de bâillon. Pas pour l’instant.

Tu vas être une gentille petite fille… souffle Ruz Tan en tapotant le nez de la pauvre petite qui venait de passer de victime à spectatrice. Tu vas rester sage. Tu vas rester muette… Et tu vas garder tout ça pour toi… Parce que si jamais tu parles…

Elle marque une pause, avant de perdre son ton léger. Son ton redevient sec. Sérieux. Brutal. Menaçant. Mais toujours aussi calme. Trop calme.

Je te fais la même chose qu’à eux. Et je ne parle de leurs chevilles… mais de ce qui va suivre. Tu as compris ?

C’était pour cela qu’elle en faisait son public. Pour qu’elle comprenne. Pour qu’elle se taise. Pas de témoins. Elle n’en voulait pas. La dernière fois, elle s’était un peu trop amusée. Pas assez prudente. Mais bon. Elle ne le regrettait pas. La vie est faite de dangers. Sinon, quand va-t-elle s’amuser ? Le seul problème… C’est qu’elle a possiblement mit en danger des êtres chers. C’est la seule erreur. Mea. Rory. Ses deux… membres de sa nouvelle famille. Famille qu’elle n’assume pas. Mais qu’elle protège. Cela l’avait mise dans une colère noire. Sans qu’elle ne le montre à sa meilleure amie. Elle n’avait pas voulu lui faire peur. Malgré que ses yeux qui avaient prit une couleur encre ce jour-là avaient été suffisamment parlants. La Démone n’était pas dupe. L’Ange avait compris ce soir-là. Elle avait compris que sa confidence avait eu un effet néfaste sur l’esprit de Ruz Tan. Une perte de contrôle. Cela l’enrageait. Autant que ça la terrorisait.

Alors maintenant… Elle fera plus attention. Pas de trace. Sauf pour ses contrats. Comme d’habitude. Elle tient à sa signature. Elle se redresse. Sans quitter la petite demoiselle du regard. Son regard émeraude si sérieux. Si calme. Si froid. Si terrifiant.

Mais dis-moi petite… Tu comptes vraiment prendre leur défense ? Tu crois qu’ils t’auraient laissée tranquille après t’avoir volée ? Tu crois qu’ils se seraient contentés de ton fric ?

Elle se penche. Elle lui attrape le visage avec une forte poigne. Ses ongles peints en noir s’enfonçant dans la chair des joues de l’Humaine. Sans pour autant la faire saigner.

Tu crois que ton joli petit minois s’en serait sorti indemne ? Que tu n’aurais pas fini au sol, rouée de coups, en sang ? Tu crois que ce sont les fleurs de ton bouquet qui les aurait satisfaits ? Et non pas celle que tu as entre les cuisses ? Ne sois pas naïve. Tu ne vas pas me dire que tu n’as pas vu que l’un d’eux a le mât dressé. Si ?

Que... Que voulez... Vous?

Ce qu'elle veut ? Elle n'a pas écouté ? Petite chose perturbée. Elle est trop terrorisée. Elle n'arrive plus à se concentrer. Les informations ne viennent pas à son cerveau. Il est embué par la peur. Par la crainte. Elle ne sait plus réfléchir correctement.

Je veux que tu regardes. Et que tu comprennes que si jamais tu parles de ce soir... De ce que je vais leur faire... Je te retrouverai. Et je te ferai subir le même sort. Tu m'as comprise cette fois, petite chose fragile ?

Elle devait être Humaine. Une Vampire se serait déjà défaite de ces liens. Une Lycane aussi. Si elle était Ange ou Démone, Ruz Tan l'aurait senti. Alors... Une Humaine ou une Esprit. L'un de deux. C'était la seule explication logique. Quoi qu'il en soit... Elle n'était qu'une chose fragile. Pathétique. Elle ne sera pas un danger pour la Démone. Sauf si elle parle. Et Ruz Tan s'assurera qu'elle garde le silence.

Il faut lui montrer qui domine. Elle a regardé aux alentours avant d'intervenir. Il n'y avait personne. Le quartier était calme. Et qui viendrait porter plainte ? Personne ne s'occuperait des voyous ni de la petite victime ici présente. Ils s'en fichaient complètement ici. Ce n'était pas leur problème. Chacun pour soi. C'était la loi dans ce genre de quartier.

Je... Je ne... Sais pas... La fleur entre mes cuisses ? Le mât ? Je ne comprends pas... Je ne comprends rien. Je vous en supplie laissez-moi partir...

La Démone en cligne des yeux d'incrédulité. Elle était sérieuse ? Elle n'avait pas compris ? Elle en leva les yeux au ciel. Oh bon sang. Elle la relâche. Sans douceur.

Putain... jure-t-elle entre ses dents. Bon, apparemment il faut que je sois crue avec toi. Le mot viol, tu connais ? Ce petit con qu'elle pointe de son long doigt, l'adolescent recroquevillé au sol, se tenant les chevilles en pleurant de douleur, bande. Et quand un mec bande, il veut baiser. Et devine quoi ? T'es son choix pour se soulager les bourses. T'as compris cette fois ou il faut que je lui baisse le froc et le tien aussi ?

Elle n'était encore jamais tombée sur quelqu'un d'aussi... naïf ? Innocent ? Pur? Un peu de tout en fait. Ruz Tan en venait à se demander si ce n'était pas une enfant qu'elle avait en face d'elle...

T'as quel âge ?

Mais... Mais pourquoi me faire voir tout ça ? Si... vous m'aviez laissé partir directement je... Je n'aurai pas eu connaissance de tout ça alors... Pourquoi ?

Elle ricane. Elle rit. Son sourire reste sur ses lèvres. Si grand. Si machiavélique. Ah. Quelle douce petite chose naïve. C'était si facile.

Pourquoi... ?

Son sourire s'agrandit. Ses dents en sont visibles.

J'aurais pu te laisser partir, oui... Tu serais rentrée chez toi. Tu te serais enfermée à double tour, puis tu serais allée te réfugier dans ton lit, sous ta couette, avec un grand pot de crème glacée ou de chocolat. Tu aurais pleuré toute la nuit, incapable de fermer l'oeil, jusqu'à l'épuisement, repassant sans cesse ce moment terrible où tu t'es faite agresser par une bande de petites racailles. Mais...

Elle marque une pause. Son regard devient plus sombre. Ses yeux émeraudes prennent une lueur inquiétante. Mauvaise.

Tu m'aurais prise pour ta sauveuse. Une héroïne qui par chance est passée par là et t'as évité un sort funeste, qui aurait dévasté ton corps et ton esprit.

Elle lui attrape le visage avec force.

Je ne suis pas une héroïne.

Elle la relâche. Avec toujours autant de force. Aucune douceur. Mais cela ne laissera aucune marque. Ce n'est pas son but.

Je ne fais pas ça pour ton joli petit minois.  Tu n'es qu'un bonus, une pochette surprise dans mon cadeau d'aujourd'hui. Et mon cadeau, c'est eux, ajouta la Démone en pointant les adolescents au sol. Tu es au mauvais endroit, au mauvais moment, pour toi. Pour moi, tu n'es qu'un... dommage collatéral. Sauf que tu aurais fini par parler, par dire ce qu'il t'es arrivé. Et ton discours m'aurait fais passer pour une gentille dame aux cheveux rouges qui t'a sauvé la vie. Elle fit mine de vomir. Ecœurant. Alors voilà pourquoi tu es attachée. Pour que tu comprennes que je ne t'ai pas sauvée. Tu n'es rien pour moi. Tu ne fais qu'ajouter un petit divertissement de plus.

Ce qui n’est que la vérité. Son regard est dur. Froid. Glacial. Elle lui dit ce qu’elle pense. Cette petite chose ne vaut pas son intérêt. Elle était incapable de se défendre. Elle n’était pas une Lycane. Pas une Vampire. Pas une Démone. Pas une Ange. Elle ne pouvait être qu’une Humaine ou une Eveillée. Pathétique. Sans force. Sans autre destinée que servir les plus puissants qu’elle. Alors pourquoi ne pas jouer avec elle ? Les faibles ne servent qu’à ça. Et à rien d’autre.

Ruz Tan lui explique ce qu’elle entendait par mât dressé. Elle avait enfin compris apparemment. Pas trop tôt.

Mais je ne veux pas faire ça !
C’est le principe d’un viol, chérie. L’un des deux doit être non-consentant.

Elle en soupire. Les yeux levés au ciel. Un court instant. Puis elle lui demande son âge. Pendant un instant, la Démone doute. Et si elle était face à une enfant ? Non. Impossible.

J'ai... J'ai 15 ans...
15 ans… ?

Son regard est perçant. A la recherche de la vérité. A la recherche du mensonge. La rouge sait mentir. Mais elle n’a pas assez d’élément pour savoir en ce qui concerne la petite. Est-elle vraiment mineure ? Elle peut le découvrir. Le bouquet de fleurs. Elle le récupère. Elle l’observe. Une carte. Rien qui l’aide vraiment. Cependant… Une adolescente ne se promènerait pas seule ici. Pas à cette heure-ci. Trop tôt pour quitter l’école. Et ce n’est pas un jour fermé. Elle n’a aucune raison d’être dehors. Dans un quartier qui n’est pas le sien. Si c’était le cas, elle ne se serait pas laissé surprendre par ces racailles. Si elle vivait là, ils ne l’auraient pas agressée. Ce genre de petits délinquants ont une espèce de code. Leur quartier… les gens qui y vivent… On n’y touche pas. Et ils aiment rester sur leur territoire. Alors… Elle est étrangère à cette zone. C’est évident. Quand on recolle les morceaux. Une solitaire peut-être ? Pas avec un bouquet de fleurs. C’est le genre de cadeau qu’on offre à un membre de sa famille. Ou à son amoureux. Mais cela revenait au même. Si elle était déjà venue ici… Si une connaissance vivait ici… Elle n’aurait pas été ciblée.

Vraiment… ?

Il n’y avait qu’une façon de confirmer. Ou d’infirmer. Son portefeuille. Elle avait forcément des papiers sur elle. La Démone la fouille. Et elle trouve ce qu’elle cherche. Elle ouvre. Pour trouver ses papiers d’identité. Mais ce n’est pas la seule chose qu’elle veut. Son regard émeraude est posé sur la demoiselle. Elle guette ses réactions. Cela lui permettra de savoir. Son visage reste de marbre. Elle se contrôle. Comme toujours. Comme elle le fait dans ces moments. Lorsqu’elle est la prédatrice.

Vérifions ça…

Bingo. Elle sourit. Son sourire n’a rien de rassurant. Loin de là. Elle soupire. Elle feint la déception. Elle feint l’ennui.

Comme c’est dommage…

Ruz Tan lui montre la carte d’identité. Il y a toutes ses informations dessus. Mais surtout celle qui l’intéresse. Son intuition était la bonne. Pensait-elle vraiment duper une Démone ? Petite chose pathétique. Petite chose stupide. Une Humaine. Il n’y avait pas le moindre doute. Enfin. Elle était persuadée. Elle savait qu’il y avait un risque qu’elle ait tort. Mais elle n’y pense pas. La rouge se dit qu’elle a raison. Elle est face à une Humaine.

Nous avons une petite menteuse…

Elle jette le portefeuille. Cette demoiselle le ramassera plus tard.

Akira, Akira, Akira… Tu sais…

La Démone s’approche. Elle lui attrape le menton. Son air est impassible. Calme. Mais ne dit-on pas qu’il faut se méfier de l’eau qui dort ? Il le faut. Tout le temps. Surtout quand elle a la couleur du sang. Dangereuse. Imprévisible. Sadique. Un sourire se dessine à nouveau sur ses lèvres carmin.

Quand on veut mentir… Il faut toujours penser aux conséquences… Oh, comment dit-on déjà ? On… fait-elle semblant d’hésiter. n’apprend pas au vieux singe à faire la grimace. Oui. C’est ça. Elle sourit. Tu n’es qu’une pauvre petite chose. Pathétique et fragile. Je devrais te tuer. Mais… Ce ne serait pas amusant. Ca ne m’apporterait rien. Tu ne m’apportes rien. Je veux juste que mon visage te tourmente. Je veux que ma voix te réveille en pleine nuit, dans la terreur. Je veux que tu m’associes à la peur. Tu comprends ça ? Oh… Et au cas où tu te poses la question… Ce n’est pas un mensonge. Je vais te laisser la vie sauve. Parce que ta mort ne m’apporte rien. Même pas un divertissement.

Elle lui lâche le menton. Ses doigts vont dans les cheveux de l’Humaine. Ruz Tan reste silencieuse. Volontairement. Pas parce qu’elle réfléchit. Elle n’en a pas besoin. Pour cette petite, ce n’est pas une torture physique qu’il faut. Mais psychologique. Le genre qui ne laisse pas de trace sur le corps.

Je sais que tu vas fermer les yeux. Mais tu ne peux pas te boucher les oreilles.

La Démone va vers la racaille qui avait eu le plus de cran. Celui qui parait être le chef. Il faut toujours s’attaquer à la tête. Le reste suivra. Et c’est ce qu’elle fait. Mais ce n’est qu’un Humain lui aussi. Elle ne peut pas s’amuser comme il faut. Alors… Comment faire…

Ses yeux se posent sur Akira.

Est-ce que tu as bien compris, gamine ? Si tu me causes le moindre problème… et crois-moi je le saurai… Je te fais subir la même chose. Puis je te tue. Alors si tu tiens à la vie, tiens ta langue ou je te l’arrache avant de te tuer.

Quelques coups d’œil vers la demoiselle. Elle ferme les yeux. Prévisible. Petite chose fragile. Petite chochotte. Elle ne supporte pas la vue du sang ? Elle ne supporte pas de voir un couteau ? Qu’est-ce qu’il se serait passé alors si Ruz Tan n’était pas intervenue ? Elle aurait littéralement fait une crise cardiaque ? Certainement. Elle n’en serait pas surprise.

Je vous en supplie arrêtez. Je n'aurais pas dû vous mentir je suis désolée mais je vous en prie arrêtez.

Elle ricane. La Démone se moque. Elle relâche brutalement le leader du groupe. Celui-ci est en larmes. A cause de la peur. A cause de la douleur. Il n’oubliera pas ce moment-là. Oh ça non. Les autres non plus. Ils ont bien trop peur. Ils sont dans l’angoisse. Dans l’attente de savoir s’ils passeront à la casserole ou non. Et qui d’abord ?

Tu crois vraiment que je fais ça juste pour te punir de m’avoir menti ? Tu crois vraiment que j’ai la moindre considération pour ça ? Tu crois SINCEREMENT que tes actes ont la moindre importance sur pourquoi ils souffrent en cet instant précis ? Ma pauvre petite chose naïve et stupide… Tu n’as décidément rien compris. Mais je n’en suis pas étonnée.

Cette Humaine n’avait pas compris dans quel foutoir elle s’était mise. Elle n’avait pas compris les intentions de ces racailles. Elle n’avait pas compris qu’il ne valait mieux pas mentir à une personne armée. Soit elle aimait jouer avec le feu… Soit elle était suicidaire… Soit elle était d’une incroyable imbécillité.

Arrêtez... Quelqu'un finira par vous retrouver...

La Démone ricane encore. Cela faisait si longtemps qu’elle marquait chacun de ses contrats. A chaque fois, ce n’était pas une petite signature. Ce n’était pas quelque chose de banal comme une carte. Ou un tag. Ou un modus operandi. Non. C’était la finalité. L’Aigle de sang. C’était ça, sa marque. Et pourtant… Cela faisait plusieurs années qu’elle exerçait. Plusieurs années qu’elle signait chacun de ses contrats avec cette cruauté. Pre-mortem. Post-mortem. Cela dépendait. De son humeur. Des clauses de son contrat. Mais jamais elle ne partait sans avoir laissé sa victime dans cet état. Et pourtant… Elle n’était toujours pas recherchée.

Ruz Tan voit la petite pleurer. Akira. C’était le nom qu’il y avait marqué sur sa carte d’identité. Elle l’avait lu. Akira Rainsworth. La Démone se redresse. Elle se pose juste devant elle. A sa hauteur. Pour qu’elle la regarde droit dans les yeux. Pour qu’elle ne puisse échapper à son regard perçant.

C’est beau de croire aux contes de fée, Akira Rainsworth… Mais tu sais… La réalité… Elle est toute autre… murmure la Démone d’une voix à la fois suave et menaçante. Les gens comme moi existent. Et les gens comme toi… leur servent de jouets. Sauf que les jouets, on peut s’en lasser… Et on les jette aux ordures… ou alors on les envoie dans l’incinérateur… Alors… Si tu ne veux pas que je me lasse de toi… Tu vas être une gentille petite fille… très… très sage… Et tu vas garder ce petit secret entre nous six… Ils vont vivre… Ne t’en fais pas… Ils vont juste se souvenir qu’il y a de plus grands méchants loups qu’eux dans cette ville… Ce ne sont que des petits joueurs comparés à moi… Et si tu ne veux pas que ça soit ton tour… Tu vas enfouir cette délicieuse après-midi dans un coin de ta tête… Sinon…

Elle trace de son doigt une ligne invisible sur la gorge de l’Humaine. La frôlant du bout de l’ongle. Comme une menace de l’égorger.

Couic. Plus de Akira. Fini.

Elle prend une pause dramatique. Immobile. Silencieuse. Avant de ricaner de nouveau. Elle lui tapote la tête. Elle voit bien qu’elle est au bord de la crise de nerfs. La Démone attend maintenant simplement que la demoiselle s’évanouisse. Après quoi, elle appellera… La police ? Les pompiers ? Une ambulance ? Elle verra bien.

La peur était lisible dans son regard. Uniquement de la peur. Uniquement de la terreur. C’était ce qu’elle voulait.

Mais je croyais que...

Son sourire s’agrandit. Elle croyait véritablement avoir eu la moindre influence ? Non. Mais c’était encore mieux que ce qu’elle avait espéré. Ruz Tan était ravie. Tout s’était déroulée d’une meilleure façon que prévue. Plus la Démone parlait, plus la petite Humaine était dévorée par l’angoisse. Parfait. C’était si parfait. C’était presque facile. Elle était tombée sur de bonnes victimes. Ces adolescents étaient là pour son sadisme corporel. Cette petite était là pour son sadisme psychologique. Lucifer devait être d’excellente humeur pour lui offrir un tel cadeau. Ou voulait-il quelque chose en retour ? Ou était-il simplement fier de tout ce que son enfant avait fait ? Elle n’était pas née de Lucifer lui-même, évidemment. Juste… une lointaine descendante ? En quelque sorte. Non ? Peu importe. Elle était fière d’être une créature infernale. Et encore davantage en cet instant. Elle s’en léchait les lèvres.

Et voilà qu’Akira tombait dans les pommes. Oh. C’était trop pour elle ? Son esprit n’avait pas pu supporter ? Il  s’était réfugié dans l’oblivion. Fragile. Faible. Elle en soupire. Mais peu importe. Que faire d’elle à présent ? Appeler la police ? Les pompiers ? Les deux étaient le plus logique. Mais avant tout… Il fallait se débarrasser de ces gamins. Elle les traîne dans une ruelle. Elle les bâillonne. Elle les assomme. Elle les cache. Elle s’occupera d’eux plus tard. Elle verra bien comment. Elle n’a pas encore décidé. Mais ce sera rapide.

Elle surveille tout de même l’Humaine pendant son nettoyage. Et les alentours. Il ne faut pas de témoins. Ca l’ennuie. Ca la gêne. Et elle n’a pas envie de tuer quelqu’un qui n’a rien à voir. Les dégâts collatéraux ? Elle s’en fiche d’habitude. Mais s’il y en a trop… Ca devient un bain de sang. Et ça… Ce n’est pas amusant. Bien. Maintenant que les racailles sont hors de vue et silencieux… Ruz Tan détache la demoiselle. Elle appelle les pompiers. Elle se fait passer pour une simple passante. Quelqu’un qui a découvert une pauvre jeune demoiselle évanouie. Elle joue bien la comédie. Elle a apprit à le faire. Il le faut bien, dans son métier. Elle joue son rôle jusqu’au bout. Elle fait semblant d’être inquiète. De ne pas savoir quoi faire. Quand les pompiers arrivent, elle continue. Elle se mord les ongles. Elle simule le stress. La panique. L’angoisse. Elle pose des questions aux pompiers. Comme si elle en avait réellement quelque chose à faire de la demoiselle. Elle les remercie plusieurs fois. Et quand tout le monde est hors de vue… Quand plus personne ne peut la voir. Quand plus personne ne peut l’entendre. Elle ricane. Au tour des adolescents maintenant.